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Un océan épuisé

Nous devons mettre fin aux subventions qui encouragent la surpêche. Les enjeux sont considérables.

Imaginez : vous êtes dans un futur pas si lointain. La surpêche, déjà la plus grande menace pour la biodiversité marine dans les années 2020, n'a fait que s'intensifier en raison de l’inaction des dirigeants mondiaux. Les captures des pêcheurs, en baisse depuis les années 1990, ont continué à décliner. Les communautés côtières sont plus que jamais en difficulté. Des milliards de personnes dépendant des produits de la pêche pour leur apport en protéines ont vu une source de nourriture essentielle se raréfier. De nombreux pêcheurs et travailleurs dont la pêche constituait la principale source de revenus ont du mal à trouver des moyens de subsistance alternatifs. Notre océan se vide chaque jour un peu plus. Nos écosystèmes, autrefois foisonnants, sont en péril.

Aujourd'hui, le temps nous est déjà compté. Notre pêche est en crise. Un océan à bout de souffle pourrait bien être notre avenir. Toutefois, ce n'est pas une fatalité.

Les membres de l'Organisation mondiale du commerce peuvent réellement et concrètement faire bouger les choses en parvenant à conclure cette année un accord important pour lutter contre les subventions à la pêche néfastes. L'océan est menacé. Or, les dernières recherches montrent que la suppression de toutes les subventions à la pêche néfastes permettrait de restituer 35 millions de tonnes de poisson à l'océan (soit quatre fois la consommation annuelle de l'Amérique du Nord) d'ici 2050.

Pour mettre en évidence les enjeux d'un accord, des photographes célèbres du monde entier ont imaginé ce qui pourrait arriver si l'Organisation mondiale du commerce n'agit pas maintenant.



Shawn Heinrichs

Parc national de Cabo Pulmo, Basse-Californie du Sud, Mexique (2020)

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Futur?

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Les plongeurs viennent du monde entier pour découvrir la foisonnante vie marine du parc national de Cabo Pulmo, au Mexique. Il y a quelques années, ce site même était considérablement appauvri en raison de la surpêche et de la perte d'habitat. Toutefois, dès lors que la communauté et des partenaires engagés dans la défense de l'environnement ont uni leurs efforts pour protéger cette zone côtière, les stocks de poissons se sont reconstitués. Cette véritable réussite en matière de sauvegarde permet aujourd'hui tant à la nature qu'aux communautés locales de bénéficier de pratiques durables. Malheureusement, la majeure partie de l'océan est toujours menacée, et les sites se trouvant en périphérie de cette zone protégée pourraient bientôt devenir déserts. Cela témoigne toutefois de l'impact et des possibilités que peut engendrer une action commune visant à lutter contre les risques qui pèsent sur la santé de l'océan, comme les subventions à la pêche néfastes.

Basse-Californie du Sud, Mexique (2021)

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Les raies mobula se rassemblent par centaines, par milliers, ou même par dizaines de milliers dans les eaux riches en nutriments situées au large de la Basse-Californie du Sud. Comme leurs cousines les raies manta, les raies mobula vivent longtemps, atteignent lentement la maturité et ne donnent naissance qu'à un seul petit en quelques années, ce qui les rend très vulnérables à la surexploitation. Leurs populations continuent à diminuer fortement dans le monde entier, car un grand nombre d'entre elles sont capturées dans des filets maillants et par des palangres, dont beaucoup sont largement subventionnés. Au Mexique, comme dans beaucoup d'endroits dans le monde, les subventions à la pêche ont amené à une expansion des flottes, mais ont aussi réduit la productivité, car la surpêche entraîne un déclin des populations de poissons et une diminution des captures.

Shawn est un cinéaste lauréat d'un Emmy Award, un photographe renommé et un fervent défenseur de l'environnement. Cofondateur de SeaLegacy, il s'est imposé comme un acteur majeur du mouvement mondial de protection des espèces et des habitats marins menacés. Nourri par sa passion pour les océans, son travail novateur associe des images saisissantes à des histoires intimistes qui incitent à la réflexion, afin de sensibiliser la communauté internationale à la beauté et à la vulnérabilité des espèces et des habitats marins menacés. Shawn est un militant très engagé dans l'initiative « Wild For Life » des Nations unies. Il siège au conseil d'administration international de WildAid, est directeur de Manta Trust et a reçu une bourse Safina et une bourse iLCP (International League of Conservation Photographers).

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Shawn Heinrichs

Jody MacDonald

Sumbawa, Indonesia (2009)

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Deux femmes portent un panier de petits poissons fraîchement pêchés pour les vendre sur le marché local de Lakey, à Sumbawa, en Indonésie. Les pêcheurs artisanaux représentent 89 % de la production halieutique en Indonésie, mais ils font également partie des habitants les plus pauvres du pays. Déjà très exposé aux effets du réchauffement climatique et de la pollution terrestre, la surpêche et la pêche illégale ne font qu'aggraver la situation du secteur de la pêche, en mettant en péril les moyens de subsistance et la sécurité alimentaire des Indonésiens. Pour protéger les communautés côtières du monde entier, les dirigeants doivent éliminer les facteurs qui favorisent la surpêche, comme les subventions néfastes.

Madagascar (2010)

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Les pêcheurs vezo présentent leurs captures matinales. En malgache, la langue locale, « vezo » signifie littéralement « le peuple qui pêche ». Depuis 2 000 ans, ils naviguent sur la portion de l'océan Indien qui sépare Madagascar du continent africain, dans des pirogues taillées à la main comme celle que l'on voit ici. Ces dernières années, la commercialisation des produits de la pêche a transformé les économies locales, passant d'un système de troc à un marché compétitif fondé sur l'argent ; et d'énormes chalutiers, généralement subventionnés par des nations étrangères, ont décimé les bancs de poissons qui permettaient au peuple vezo de conserver son mode de vie traditionnel. À mesure que les subventions continuent d'encourager une pêche non durable, la migration et l'identité des vezo sont menacées.

Madagascar (2010)

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Un jeune pêcheur vezo se débat avec un poulpe accroché à son bras dans les eaux chaudes de l'océan Indien, au large des côtes de Madagascar. Le poulpe est essentiel à l'économie de sa petite communauté de pêcheurs. Le passage à la pêche commerciale a poussé le peuple vezo à capturer davantage que ce qui est durable, mettant ainsi en péril le milieu marin unique de la région, qui se compose de récifs coralliens, de mangroves et de prairies sous-marines. En 2004, les dirigeants locaux se sont imposé des règles qui ont permis à la population de poulpes de se reconstituer. Cette réussite a inspiré d'autres villages de pêcheurs. Toutefois, pour que les progrès soient maintenus, les incitations économiques comme les subventions doivent être en phase avec les objectifs de durabilité, notamment pour les flottes industrielles dont la pêche affecte ce même écosystème.

Photographe primée férue d'aventure, Jody MacDonald n'est pas étrangère à la découverte des derniers recoins inexplorés de notre planète. Elle a passé sa jeunesse en Arabie saoudite avant de faire deux fois le tour du monde en une décennie à bord d'un catamaran de 18 mètres pour une expédition de kitesurf, de voile, de surf et de parapente. Elle a voyagé dans plus de 100 pays à la recherche de l'inconnu. Que ce soit en sautant à bord d'un train dans le Sahara ou en survolant l'Himalaya en parapente à 5 580 mètres d'altitude, elle aime sortir des sentiers battus pour documenter des sujets qui mêlent narration perspicace, expéditions aventureuses et sources d'inspiration de changements sociaux dans l'espoir de favoriser la préservation de lieux sauvages.

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Jody MacDonald

Sirachai Arunrugstichai

En dehors de la zone protégée du parc national de Mu Koh Lanta, Krabi, Thaïlande (2015)

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Aux premières lueurs du jour, des milliers de poissons sont remontés à la surface par les pêcheurs d'un senneur commercial dans la mer d'Andaman, juste à la sortie du parc national de Mu Koh Lanta, en Thaïlande. Depuis l'explosion de la pêche industrielle financée par des subventions, dans les années 1960, les captures par unité d'effort dans la mer d'Andaman ont baissé de plus de 75 %. À mesure que les populations de poissons continuent de rétrécir, l'industrie florissante qui permet à la Thaïlande de figurer parmi les plus grands exportateurs de fruits de mer du monde va être de plus en plus affectée. Si elles ne sont pas contrôlées, les subventions destinées à soutenir le secteur de la pêche et ceux qui en vivent peuvent, à terme, contribuer à son effondrement.

Atoll de Kooddoo, Maldives (2017)

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Une touriste plonge sa main dans un banc de plancton attiré par les phares nocturnes du bateau de plongée, alors qu'un requin-baleine le dévore à pleines bouchées. Le requin-baleine, plus gros poisson existant, est inoffensif pour l'homme, et le tourisme qu'il génère aux Maldives et dans d'autres pays génère des bénéfices économiques substantiels pour les communautés locales. Malheureusement, la popularité de leurs ailerons les soumet à une forte pression en raison de la surpêche. Ils sont aussi régulièrement victimes de captures accessoires, lorsqu'ils s'emmêlent dans des filets de pêche non sélectifs ; dans de nombreuses régions, ces filets sont fournis aux pêcheurs par les gouvernements à titre de subvention. Si nous ne faisons rien, ces gentils géants, qui sont déjà en danger aujourd’hui, seront soumis à des pressions croissantes, menaçant ainsi leur avenir et le tourisme qui repose sur eux.

Île de Koh Adang, parc national de Mu Koh Tarutao, Satun, Thaïlande (2017)

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Un plongeur urak lawoi vêtu d'un équipement de plongée artisanal porte un piège à poissons tout en parcourant le fond de la mer dans le parc national de Mu Koh Tarutao, en Thaïlande. Les Urak Lawoi sont une tribu autochtone malaise qui vit en petites communautés le long de la côte sud d'Andaman en Thaïlande. Bien que les Urak Lawoi se soient adaptés au mode de vie moderne en raison de l'afflux de visiteurs dans l'archipel d'Adang-Rawi, la pêche artisanale reste leur principale activité. Si la surpêche non contrôlée continue à être autorisée, c'est le mode de vie entier de ces pêcheurs traditionnels qui sera mis en péril.

Sirachai « Shin » Arunrugstichai est un reporter-photographe indépendant qui se spécialise dans la protection du milieu marin. Il est membre associé de l'International League of Conservation Photographers, l'un des artistes de l'Asie du Sud-Est du World Press Photo 6x6 Global Talent Program, et il a également décroché une bourse de reportage auprès de la National Geographic Society. Il travaille régulièrement pour des organisations de protection de l'environnement, notamment l'UICN, la fondation Save Our Seas, WildAid et Greenpeace, et réalise des reportages pour Getty Images en tant que pigiste. Les photos de Shin ont été publiées, entre autres, dans The Washington Post, The New York Times, The Guardian et le National Geographic.

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Sirachai Arunrugstichai

Sumer Verma

Les îles Galápagos (2019)

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Une masse colossale et envoûtante de thons à dents de chien encercle complètement le photographe lors d'une plongée matinale dans le froid glacial des îles Galápagos Bien que la mer peu profonde et riche en nutriments dans laquelle vivent ces thons soit protégée, des flottes de pêche industrielle étrangères, souvent financées par des subventions, rôdent à la limite des eaux territoriales de la réserve. Les pêcheurs artisanaux de la région doivent déjà se déplacer de plus en plus loin pour des captures de plus en plus maigres. Les défenseurs de l'environnement tirent la sonnette d'alarme et affirment que la pression sans précédent exercée par la surpêche menace désormais la vie marine de ce célèbre archipel.

Originaire d'Inde, Sumer est un photographe et cinéaste du milieu sous-marin. Il a implanté son activité entre Bombay et les îles Andaman-et-Nicobar. Fervent défenseur des océans, il s'aide de la photographie pour sensibiliser le public aux océans et aux menaces auxquelles ils sont confrontés.

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Sumer Verma

Yuyang Liu

Joal-Fadiout, Sénégal (2016)

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Des pêcheurs sénégalais dégustent du poisson grillé pour le dîner sur leur bateau. Comme de nombreux stocks de poissons continuent de péricliter en raison de la surpêche, les pêcheurs artisanaux d'Afrique de l'Ouest doivent s'éloigner de plus en plus des côtes pour capturer suffisamment de poissons à vendre, sous peine de rentrer à la maison les mains vides. Ce phénomène est largement imputable à l'afflux dans leurs eaux de flottes industrielles étrangères, généralement financées par des subventions. Si ces subventions néfastes sont maintenues et ainsi, continuent de provoquer une importante surpêche qui appauvrit les eaux d'Afrique de l'Ouest, la sécurité alimentaire et les moyens de subsistance continueront à se dégrader. De nombreux pêcheurs risquent alors d'être contraints d'abandonner cette activité traditionnelle et de trouver d'autres moyens de subvenir aux besoins de leur famille.

Né en 1991,Yuyang Liu est actuellement basé à Chengdu, en Chine. Il est membre du jury des ADC Awards dans la catégorie photographie, et avait été sélectionné parmi les « Neuf photographes chinois à suivre impérativement » par le magazine TIME et comme photographe émergent de PDN 30 en 2017. Il a également décroché la bourse de la fondation Magnum pour les droits de l'homme et la photographie, la bourse Ian Parry et la bourse Abigail Cohen dans le domaine de la photographie documentaire, entre autres. Ses œuvres ont été exposées à New York, Londres, Shanghai, Paris et Berlin, notamment. Elles ont également été publiées dans le magazine TIME, The New York Times, The Wall Street Journal, The Science et The Lancet, entre autres. Il collabore également avec des ONG.

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Yuyang Liu/Greenpeace